Cœli et Terra fête ses vingt ans


Côté coulisses...

Les assistantes du chef...Derrière ce groupe « toujours en noir » sur scène, qui sont ces hommes et ces femmes qui consacrent tant de jeudis soirs et tant de week-ends à la musique ? Qu’est-ce qui leur fait préférer les répétitions à Roubaix dans la manécanterie de l’église Saint-Joseph, considérée tantôt comme une étuve par les uns, tantôt comme une glacière par les autres, aux sorties du samedi soir entre copains ou aux repas dominicaux en famille ? A l’heure où certains dorment encore profondément le dimanche matin ou se pressent à l’église qui sonne la messe, les chanteurs de Cœli et Terra, semblables aux adeptes d’une secte étrange, viennent fidèlement s’asseoir devant leurs pupitres abandonnés la veille au soir...
Le chef donne le laN’ont-ils ni famille, ni amis, ni métier pour se consacrer ainsi à Saint Joseph ? Ils les ont presque oubliés, semble-t-il et c’est tout juste si aux pauses, en avalant leur sandwich , ils ont le temps ou ressentent la nécessité d’échanger au sujet de leurs activités professionnelles ou préoccupations familiales, ces étudiant, électricien, retraité, mère au foyer, chercheur, ingénieur, cariste, documentaliste, professeur, secrétaire... C’est aussi que les origines sociales ou géographiques - certains viennent de loin : Boulogne, Douai, Paris ou même Dijon - ne comptent guère plus que les différences d’âge quand on chante ensemble. Et c’est bien là ce qui les unit.
Mais quelle organisation personnelle suppose cet investissement, à quelles discussions ou négociations au sein des familles conduit cette passion de la musique ? Bref, qu’est-ce qui motive les chanteurs à participer à cet ensemble vocal malgré la fatigue de fin de semaine, les soucis, le travail, les proches qui préféreraient sans doute les savoir à la maison?

tutti
Le plaisir et le travail ...
Nous nous retrouvons douze week-ends par an ainsi que certains jeudis soirs dans l’ancienne  manécanterie de l’église Saint-Joseph, à Roubaix, aménagée spécialement pour nous, mais aussi les veilles de concerts pour « filer », sur place cette fois, le programme annoncé.
Chaque choriste possède de solides connaissances en solfège lui permettant d’arriver aux répétitions en connaissant sa partition ; les difficultés de rythme ou de « prise de note » seront réglées en répétition, par pupitre ou en tutti, grâce à Nicole Bonnardel et Catherine Betchen-Remy qui secondent Maurice Bourbon, ou bien, avant le travail collectif, grâce à l’un ou l’autre des choristes animant un travail préalable de pupitre. Toute répétition débute par un travail d’échauffement des voix et des cours de technique vocale nous permettent de progresser tout au long de notre « carrière » ; il ne suffit pas d’avoir de la voix et de connaître les notes !
La recherche de la justesse, de l’harmonie est primordiale au sein de notre ensemble : nous sommes à l’écoute des autres ; en outre, toute une réflexion sur la prosodie, le phrasé s’impose : comment accentuer les mots, la phrase... comment aussi respecter la langue, française ou étrangère ; heureusement, nous ne manquons pas de chanteurs ou d’amis compétents en latin, anglais, italien, russe, hongrois ou allemand pour nous traduire les textes que nous interprétons ou pour rechercher la prononciation de ces œuvres des siècles passés. Nous abordons en effet tous les répertoires, et chantons dans toutes les langues ; aux uns, la quête, par Internet notamment, de renseignements biographiques sur les compositeurs, tandis qu’au chef incombent les recherches à la Bibliothèque Nationale quand il s’agit de recourir aux manuscrits originaux pour vérifier, par exemple, telle ou telle altération qui manquerait dans les éditions modernes....
Si le choix et l’interprétation des œuvres,  la distribution des voix, selon la « couleur » recherchée , sont du ressort du chef de chœur, la constitution des programmes, l’enchaînement des pièces par tonalités, le déroulement des répétitions, leur calendrier et celui des concerts sont élaborés par Maurice et ses assistantes qui le relaient aussi parfois pour diriger le chœur, ainsi que d’autres chanteurs qui deviennent, le temps d’une répétition, « chefs de pupitre » à leur tour.
Enfin, depuis quelque temps, d’autres aventures musicales nous sont offertes nous obligeant à sortir des chemins battus, nous mémorisons textes et musiques pour certains spectacles théâtraux, nous nous lançons dans l’exploration de lieux insolites, nous laissant aller à l’improvisation, sous la houlette de notre chef...
[textes d'Anne Tabary, soprane]




Cœli et Terra a donc 20 ans. J'y suis depuis maintenant 15 ans. Bilan.

Pourquoi je me suis engagé à Cœli et Terra ?
  1. Volonté de reprendre une activité chorale en jachère depuis trop longtemps (plus de dix ans!).
  2. Intérêt musical à la fois du point de vue vocal (célébration de la voix), du point de vue technique (exigence du chef et excellence du chef en tant que chef), du point de vue musicologique et du point de vue esthétique.
Souvenir de ma première "rencontre" avec Cœli et Terra (avant même d'y chanter)

En quête d'activité chorale "responsable", c'est-à-dire en petit groupe, j'ai entendu Coeli et Terra le 21 juin 1992 à l'église Saint Etienne de Lille (fête de la musique). L'interprétation des extraits de la messe de Martin proposée ce soir-là m'a convaincu immédiatement que je devais chanter avec eux. Le groupe était assez peu nombreux. J'étais au premier rang sur la gauche ; face à moi, un seul baryton tenait la partie basse du premier choeur. C'était bien à des chanteurs de cet acabit que je voulais me mêler ! Je vois Maurice Bourbon à la fin du concert ; il me propose une date pour m'auditionner... Il me fait déchiffrer, sans prévenir, le Kyrie de Martin !

Les temps forts à Cœli et Terra ?

Les enregistrements sont peut-être de ces moments qu'on n'oublie guère. Mais à Cœli et Terra, chaque prestation est un moment fort : le chef se donne à fond à chaque fois, pas de routine; tout est toujours remis en cause, tout est toujours travaillé avec la même force d'attention et de rigueur que la première fois... Même chose pour les chanteurs : à Coeli et Terra chaque concert est une mise à l'épreuve renouvelée.

Pourquoi je fais toujours partie de Cœli et Terra ?
   
Tout simplement parce que les raisons qui m'ont fait y adhérer sont toujours pertinentes.

À quel prix je participe toujours aux activités de Cœli et Terra ?
   
La principale difficulté vient du conflit entre la logique du quasi-professionalisme défendu bec et ongles par le chef et la logique d'amateurisme qui est économiquement la mienne. Conflit entre principe de plaisir (plaisir du bel ouvrage) et principe de réalité (réalité du temps compté, volé aux autres sphères de ma vie - familiale, professionnelle, etc.). Le prix payé par ma famille notamment est assez élevé, même si, 15 ans après, ils ont fini par trouver cela normal...



revenir à la page musique

Si vous êtes arrivé sur cette page directement, sans passer par la case "Tard-Bourrichon", il vous suffit de ... vous y rendre.
© Bruno Richardot, septembre 2006